Le cerf-volant au secours des navires « énergivores »

De Francis CURTA (AFP) EN MER DU NORD

 Le vraquier passerait presque inaperçu, si ce n’était le cerf-volant géant à la poupe qui aide à sa propulsion et qui, selon ses promoteurs, pourrait révolutionner le transport maritime.
Le cerf-volant –160 m2 de voile blanche en forme d’aile de parapente– remorque le navire long de 87 mètres, lui permettant de réduire les moteurs et de réaliser des économies de fioul de 10% à 15% par an, selon la start-up allemande SkySails qui se présente comme leader mondial de cette technologie.

« Le prix du carburant va certainement augmenter de façon dramatique à l’avenir, et les restrictions aux émissions de gaz vont imposer des coûts supplémentaires au transport maritime dans les quatre à cinq prochaines années » en raison de nouvelles mesures de lutte contre le réchauffement climatique, prévoit Michael Gadzali, du groupe d’investissements maritimes Oltmann, principal financier de SKySails.

« La technologie du cerf-volant permet d’exploiter plus d’énergie que tout autre équipement utilisant l’éolien », y compris les voiles de bateaux, déclare Stephan Wrage, patron de SkySails.

L’efficacité du cerf-volant vient du fait qu’il évolue à plusieurs centaines de mètres de haut, et accélère en vol.

Contrôlé par ordinateur, il décrit des demi-cercles ou des figures de huit pour augmenter sa vitesse et décupler sa force de traction.

« Si vous doublez la vitesse en vol vous multipliez par quatre l’énergie. C’est là tout le secret du système », explique M. Wrage, qui a également mis au point un cerf-volant de 320 m2 « avec une poussée maximum de 32 tonnes, soit plus que deux moteurs d’Airbus A320 ».

Cette technologie est surtout adaptée aux cargos et aux pétroliers naviguant à petite vitesse, soit moins de 15 noeuds (28 km/h), lors de longues traversées dans des régions à fort potentiel de vent, selon les ingénieurs.

Contrairement à ses cerfs-volants, la compagnie, créée il y a 10 ans, n’a pas encore le vent en poupe.

« Quand j’ai fondé SkySails, le prix du pétrole était de 21 dollars (le baril) et tout le monde pensait que j’étais fou », déclare M. Wrage, qui, à l’âge de 38 ans, aime toujours jouer au cerf-volant à la plage.

Le développement de la technologie s’est fait lentement, avec nombre de revers. Et la compagnie a souffert de la crise économique qui a rudement frappé le commerce maritime.

« Les temps ont été durs », reconnaît M. Wrage, dont la compagnie n’a réussi jusqu’à présent qu’à placer cinq cerfs-volants à bord de navires, au prix de 500.000 à 1 million d’euros.

Mais il voit dans la course aux économies d’énergie et la reprise économique l’espoir d’un nouvel envol.

Certains spécialistes demeurent toutefois sceptiques.

Le système « n’est pas adapté à la plupart des porte-conteneurs qui naviguent à haute vitesse », assène ainsi Max Johns, porte-parole de l’Association des armateurs allemands.

Le cerf-volant, selon lui, ne sera qu’un élément dans une panoplie de nouveaux systèmes qui verront le jour pour pallier l’augmentation du prix du carburant, qui représente actuellement 60% du coût des transports maritimes. « Je ne pense pas qu’on en revienne à l’énergie de la voile », ajoute Uwe Brümmer, capitaine et responsable des inspections à la compagnie maritime SAL

La propulsion éolienne « ne va pas joueur un grand rôle pour l’instant » déclare pour sa part Uwe Hollenbuch, un ingénieur responsable du bassin d’expérimentations techniques maritimes de Hambourg. Les armateurs estiment « qu’ils font plus d’économies en utilisant des navires plus grands et en réduisant leur vitesse » qu’en ne comptant que sur les aléas du vent., qui voit l’avenir dans les moteurs à gaz.

 

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